Si on réfléchit à ce qui se passe à Notre Dame des Landes depuis une
semaine, il y a un fait vraiment inquiétant : le silence du « mouvement
social français ».
Depuis mardi matin, plus de 500 gardes mobiles ont envahi la campagne
tranquille du Nord de Nantes, ils ont chassé les gens de leur habitat,
détruit des maisons et enlevées les pierres une par une pour s'assurer
qu'elles ne seraient pas rebâties. Depuis six jours, environ 200
personnes dorment chaque nuit sur des barricades, respirent des gazs
lacrymo, organisent le ravitaillement des copains en première ligne,
tout cela dans une non-violence exemplaire (sinon, il n'y aurait pas cet
assourdissant silence médiatique!). Depuis quelques jours, des gros
ballots de vêtements, de bottes, de chaussettes, de piles, de pommes, de
pâtes, de légumes, de café, de jus de fruits, de barres de céréales,
affluent dans le hangar qui sert de QG à la résistance, témoignant que
si peu de gens osent s'aventurer dans le « territoire en guerre » qu'est
devenu ce beau bocage, il existe une véritable indignation dans la
population.
Et enfin bon, des raisons de s'indigner il y en a tout de même : il n'a
rien d'autres à faire ce gouvernement que de mobiliser des centaines de
flics pendant des semaines pour chasser des gens de leur maison alors
qu'il semble qu'il y ait une crise du logement dans ce pays, rien de
plus urgent comme dépense que de construire un aéroport pour en
remplacer un autre loin d'être saturé alors qu'on nous dit que la
priorité c'est de réduire les déficits, rien de plus important que de
développer le trafic aérien alors qu'il paraît qu'il y a un truc qui
s'appelle le changement climatique ???
Alors pourquoi ce silence ?
- Soit, ce qui est une possibilité réelle, le mouvement social est bien
mal en point, tué par la « crise », asphixié par l'arrivée de la gauche
au gouvernement,
- Soit ce combat n'est pas celui du mouvement social, car ceux qui
luttent pied à pied à Notre Dame des Landes ne sont pas très
présentables, un peu trop boueux, avec en prime des têtes un peu trop
jeunes et que donc certainement ils sont violents, donc peu
fréquentables,
- Soit encore vous ne savez pas quoi faire.
Si c'est cette dernière option qui prime, quelques idées
:
La résistance à Notre Dame des Landes est incroyable. Il est incroyable
que quelques centaines de personnes sans moyen financier, sans soutien
logistique aucun à part celui de quelques habitants et paysans des
alentours, logeant dans des abris de fortune, sans eau, sans
électricité, aux vêtements détrempés, aient résisté une semaine derrière
des barricades de bric et de broc face à une véritable armée. Ils sont
encore là et ne vont pas lâcher, même si il leur faudra probablement se
replier à un moment ou à un autre.
Il ne manque pas de courage ni de détermination à Notre Dame des Landes.
Il manque de la légitimité.
Et cela, vous, vous qui savez écrire, qui avez les arguments en tête,
qui êtes reconnus socialement comme des gens « sérieux », qui avez de
l'audience auprès des militants de vos organisations, qui connaissez des
journalistes, qui êtes en contact avec des politiques, vous qui êtes
respectés, vous pouvez le donner à la lutte de Notre Dame des Landes :
de la légitimité.
Ce sont des choses que vous savez faire : écrire aux pages débat des
journaux, organiser des conférences de presse, passer des coups de fil à
droite à gauche, signer des tribunes collectives, intervenir lors de
conférences, convaincre des gens connus d'aller à Notre Dame des Landes,
ne serait-ce qu'une demi-heure, pour qu'ils puissent dire leur
indignation devant les médias, puisque ces médias n'ont rien à faire de
l'indignation des gens ordinaires.
Vous savez faire cela et c'est vraiment le moment de le faire maintenant.
Cette lutte est exemplaire et c'est aujourd'hui à chacun-e d'entre vous
de permettre au mouvement social dans son ensemble de faire preuve d'une
solidarité exemplaire.
http://acipa.free.fr/Savoir/savoir.htm
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