mercredi 27 mai 2009

De quoi faire réfléchir Xavier Darcos ... normalement ;o))

Debarbieux : Les "fouilles systématiques" peuvent "augmenter la violence"


Pour le directeur de l'Observatoire international de la violence à l'école, l'installation de détecteurs à l'entrée des établissements ne ferait que renforcer le "ressentiment montant des élèves".

Les portiques de détection et les fouilles "systématiques" contre l'intrusion d'armes en milieu scolaire peuvent avoir l'effet pervers "d'augmenter la violence", a déclaré le directeur de l'Observatoire international de la violence à l'école Eric Debarbieux au Monde, apprend-on mercredi 27 mai.
"En France, sous le coup d'un certain affolement, des 'solutions' comme la vidéosurveillance ou des détecteurs sont réclamées à cor et à cri. La moindre des précautions avant de les adopter serait d'examiner leur efficacité", a expliqué Eric Debarbieux.
"L'effet des détecteurs à l'entrée des établissements a été évalué, entre autres, par une enquête du FBI. Contrairement à la légende, ces détecteurs ne sont présents que dans moins de 1% des écoles américaines (...). Les effets pervers en sont bien connus: ressentiment montant des élèves, sentiment de mépris, éventuellement renforcé par la fouille des cartables et, finalement, augmentation de la violence antiscolaire !", a-t-il ajouté.

"Moyens les plus sûrs d'augmenter la violence"

"Les fouilles systématiques sont un des moyens les plus sûrs d'augmenter la violence. Quant à l'intervention ou la présence d'une 'force', de nature policière ou non, tout dépend de son style. Si c'est, par exemple, une vraie police de voisinage, en lien avec les établissements, les habitants, les jeunes eux-mêmes, alors oui, il y a des expériences très concluantes, comme à Toronto, au Canada", a-t-il poursuivi.
Selon Eric Debarbieux, il n'y a pas depuis 10 ans d'augmentation "globale" de la violence à l'école en France, mais "une forte augmentation" des faits visant les adultes (enseignants, surveillants, etc.).
Pour lui, "la relation pédagogique est au coeur du problème" et "l'importance de la stabilité des équipes pour la protection des élèves et des personnels est une constante dans la recherche internationale".
"Or, notre système de recrutement des personnels de l'enseignement secondaire est une catastrophe. Elle se traduit par l'envoi en masse de jeunes débutants, non ou peu formés, dans des établissements sensibles dont ils n'ont qu'une idée: en partir. La manière dont est cogérée la nomination de nos enseignants est insensée. J'avoue en avoir assez de le répéter", a-t-il dit. (Nouvelobs.com)

samedi 23 mai 2009

Est-ce que la légalisation commencera en Californie ?

Le comté de Humboldt, vaste territoire montagneux et verdoyant, est au coeur du fameux Triangle d'émeraude, première région productrice de marijuana de la Côte ouest américaine. Ici, des gangs organisés cultivent le cannabis à grande échelle : en plein air au fond de vallées inaccessibles, ou dans des containers, des tentes, des hangars, des pavillons de banlieue et même des appartements de centre-ville aux fenêtres condamnées, transformés en pépinières.

A Arcata, jolie bourgade côtière, le cannabis est omniprésent. Régulièrement, des amateurs de joints organisent des "fêtes cannabis" dans un parc, où tout le monde fume, sous l'oeil blasé de la police. La ville compte trois magasins d'outillage spécialement conçu pour la culture et le traitement du cannabis, des boutiques de vêtements et accessoires fabriqués en chanvre. Sur la grand-place, des chômeurs attendent patiemment qu'un cultivateur de cannabis arrive en 4 × 4 et leur propose du travail.

Arcata compte aussi quatre "dispensaires", des boutiques où l'on vend en toute légalité de la "marijuana médicale". En Californie, le cannabis a un double statut. Son usage récréatif reste interdit : la possession d'une petite quantité est un délit passible d'une amende, et les gros trafiquants risquent la prison. Mais depuis le vote par référendum, en 1996, de la Proposition 215, son usage à des fins médicales est autorisé.

Si un médecin estime que la marijuana peut calmer les douleurs ou les angoisses d'un malade chronique, il peut lui prescrire de fumer un ou plusieurs joints par jour, ou de manger des fleurs de cannabis dans un gâteau. Muni de son ordonnance, le patient se fait délivrer par les services municipaux une carte cannabis, qui l'autorise à en transporter pour son usage personnel.

La Proposition 215 a permis le développement d'une puissante industrie, à la lisière de la légalité. Dans tout l'Etat, des cabinets médicaux spécialisés rédigent des ordonnances de complaisance à la chaîne, pour 100 ou 200 dollars. Trois cent mille Californiens possèdent aujourd'hui une carte cannabis.

Certains le font pousser eux-mêmes, d'autres délèguent la culture à un soignant officiel, qui devient producteur légal pour le compte d'autrui. Le soignant peut sous-traiter la culture à un agriculteur, et ouvrir un dispensaire. Ailleurs, des groupes vivant en communauté louent des terres agricoles et cultivent le cannabis dans des fermes collectives. Ils distribuent gratuitement une partie de leur récolte à leurs patients encartés, et vendent le reste au marché noir.

Il existe plus de cinq cents dispensaires en Californie, surtout dans les villes gérées par le Parti démocrate. Certains sont d'authentiques centres de soins, d'autres des vitrines légales pour les militants de la légalisation, ou encore de pures entreprises commerciales. Dans les villes conservatrices, les autorités locales utilisent tous les moyens pour décourager leur implantation. Procès et contre-procès se multiplient, intentés par les militants procannabis contre des collectivités locales, et vice versa. La situation est encore compliquée par le fait que le gouvernement fédéral de Washington ne reconnaît pas la Proposition 215, et mène une répression sporadique contre les dispensaires.

A Arcata, le dispensaire baptisé Patient Resource Center est géré par une femme d'affaires énergique. Les clients font la queue devant un petit guichet, choisissent leur variété préférée sur catalogue, et paient entre 30 et 40 dollars le sachet de 3,5 grammes. Derrière la boutique, une vaste serre abrite plus de mille plantes, cultivées sous lampe et irriguées au goutte-à-goutte. A l'étage, des milliers de jeunes pousses attendent d'être mises en terre. Ce système de rotation, contrôlé par ordinateur, permet une récolte tous les dix jours, tout au long de l'année.

Dans la même rue d'Arcata, un autre dispensaire, Humboldt Coop, tenu par un expert en gestion des collectivités locales, fournit à lui seul près de 8 000 patients dans tout l'Etat. Il sous-traite la culture à des agriculteurs de la région, qui arrondissent ainsi leurs fins de mois.

Face à cette situation inextricable, les autorités du comté cherchent une solution. Paul Gallegos, le district attorney du comté ("chef procureur") installé dans le port d'Eureka, à 10 km d'Arcata, continue à pourchasser les trafiquants. Pourtant, il en est arrivé à la conclusion que le mieux serait de légaliser le cannabis : "Je ne parle pas de demi-mesures comme la dépénalisation, il faudrait que la marijuana soit complètement légale, et que l'administration puisse surveiller la production. En lui-même, le cannabis ne pose pas de problèmes de sûreté, seulement des problèmes d'éducation et de santé."

M. Gallegos rêve de supprimer l'immense gaspillage provoqué par cette guerre sans fin de l'Etat contre le cannabis, et surtout de mettre fin à l'hypocrisie générale : "Le maintien de ces lois inapplicables sape l'autorité de l'Etat. La justice devient une farce, la population perd tout respect envers les institutions."

La légalisation aurait selon lui un autre avantage : "Le prix du cannabis s'effondrerait, les trafiquants se retrouveraient au chômage. En fait, les deux seuls groupes vraiment opposés à la légalisation sont les forces de l'ordre, pour des raisons culturelles, et les dealers, pour des raisons économiques."

Même au sein de la police, les mentalités changent. Le détective Wayne Cox, qui travaille sous les ordres de Paul Gallegos, semble être du même avis que son patron. Cette évolution ne s'est pas faite sans déchirement, car M. Cox est un ancien de la brigade des stups : "Une chose est sûre, plus jamais je ne risquerai ma peau en allant défoncer la porte d'un trafiquant de cannabis, ça n'a plus de sens. Récemment, j'ai contrôlé un adolescent qui conduisait un 4 × 4 tout neuf, il venait de l'acheter cash, 70 000 dollars. Dans la voiture, j'ai trouvé une facture pour un équipement stéréo à 30 000 dollars. Les jeunes du comté n'ont plus d'autre ambition que de cultiver du cannabis." A demi-mot, le policier et le magistrat reconnaissent que l'industrie du cannabis apporte une certaine prospérité à la région, durement touchée par le déclin de la pêche et de l'exploitation forestière.

Le principe de la légalisation n'effraie plus les responsables locaux. Mark Lovelace, supervisor du comté ("chef de l'exécutif local"), n'a rien contre, à condition qu'elle profite aux agriculteurs de la région : "Je ne voudrais pas voir débarquer ici des grosses entreprises d'agrobusiness, qui créeraient des exploitations intensives et transféreraient leurs profits ailleurs. Il faudrait que la production reste à taille humaine."


Dans de nombreuses villes californiennes, l'action de la police est de plus en plus bridée. Des conseils municipaux démocrates ont décrété que la répression de la consommation de cannabis devait être "la plus basse priorité possible" pour les policiers. D'autres ont voté des résolutions visant à instaurer la liberté de fumer chez soi et dans des clubs privés.

A Sacramento, capitale de l'Etat, des hommes politiques procannabis, aidés par une myriade d'associations, sont passés à l'offensive. Tom Ammiano, représentant démocrate de San Francisco à l'Assemblée législative, a déposé un projet de loi visant à la légalisation : "Selon des études du département de l'agriculture, le cannabis représente en Californie un marché de 14 ou 15 milliards de dollars par an, plus qu'aucun autre produit agricole. Si cette production était réglementée et taxée, comme l'alcool, cela ferait rentrer un milliard et demi de dollars par an dans les caisses de l'Etat. En ces temps de crise et de déficit budgétaire, ce ne serait pas négligeable."

M. Ammiano sait que la partie est loin d'être gagnée, mais il est confiant : "Pour la première fois, toutes les conditions favorables sont réunies. Les sondages montrent que 55 % de la population sont pour la légalisation. Les démocrates détiennent la majorité dans les deux Chambres de l'Assemblée législative."

M. Ammiano a reçu le soutien de plusieurs élus et de membres de la haute administration. Betty Yee, directrice du Trésor, qualifie le projet de loi de "mesure de bon sens", qui permettrait une "utilisation plus avisée des ressources publiques". Le shérif de San Francisco, Michael Hennessey, va plus loin : "Réprimer la consommation de marijuana, c'est comme faire un château de sable pour arrêter la marée montante. La marijuana fait partie intégrante de la culture populaire californienne."

De son côté, le gouverneur républicain Arnold Schwarzenegger a récemment déclaré qu'il était ouvert à une discussion sur ce sujet délicat. Une vidéo remontant aux années 1970 le montrant fumant un joint, écroulé dans un fauteuil avec un large sourire, est visible sur YouTube.

Par ailleurs, M. Ammiano constate que le gouvernement Obama, sans être en faveur de la légalisation, a une position plus souple sur ce sujet que son prédécesseur. Le ministre de la justice Eric Holder a annoncé que la police fédérale allait cesser ses raids contre les dispensaires, s'ils sont en conformité avec la loi locale.

Au cas où le projet de loi de M. Ammiano ne serait pas voté, une alliance d'associations procannabis et de groupes de la gauche libertaire a lancé en parallèle une autre procédure : un référendum d'initiative populaire, qui pourrait avoir lieu dès novembre 2010.

Yves Eudes Arcata (Californie)

lundi 4 mai 2009

Fichage des SMS en route ???




24 heures de garde à vue... pour une mauvaise blague reçue par texto. Le Courrier Picard raconte, dans son édition de ce week-end, comment Stéphane, un jeune homme de 29 ans habitant Abbeville (Somme), a passé une nuit au poste. Tout commence avec un SMS envoyé par un collègue de travail: «Pour faire dérailler un train, t'as une solution ?».

Stéphane ne réagit pas à la plaisanterie. Mais le 16 avril, il est convoqué au commissariat d'Abbeville en fin d'après-midi. Il s'y rend sans inquiètude. Mais sur place, le ton change: «J'entends parler d'affaire criminelle, de terrorisme, et d'une garde à vue qui pourrait durer dix jours, raconte Stéphane au Courrier Picard. On me demande si je suis capable de choses farfelues comme, par exemple, faire dérailler un train.» Le jeune menuisier donne le nom de son collègue, auteur du SMS. La police perquisitionne chez lui, et le ramène également au commissariat.

Vers 16 heures, Stéphane est placé en garde à vue, sur instruction du parquet. «C'était un véritable choc. En deux secondes, j'ai eu l'impression de devenir un vulgaire criminel. Je me retrouve dans une belle cellule jaune qui sent la pisse, j'ai l'impression d'être traité comme un chien.» Le lendemain, les auditions reprennent. Stéphane ne retrouve la liberté qu'à partir de 16 heures, soit au bout de 24 heures de garde à vue. L'auteur du SMS est également libéré.

L'affaire de Tarnac en toile de fond

Stéphane s'est en fait rendu coupable de «non dénonciation de crime» face à ce SMS jugé «tendancieux». D'où le placement en garde à vue, une «procédure pénale [qui] est la même pour tout le monde, que le risque soit probable ou peu probable», rappelle Éric Fouard, le procureur de la République d'Abbeville. Ce dernier admet cependant que la récente affaire de Tarnac (Corrèze) «a certainement joué en sa défaveur».

Quant à savoir comment ce SMS a fini sur le bureau du procureur, il faut chercher du côté de l'opérateur, selon Le Courrier Picard. «L'appareil sur lequel Stéphane a reçu ce SMS était un téléphone prêté par l'opérateur, le sien étant en réparation», explique le journal. «L'opérateur a le droit de consulter ces messages et le devoir d'alerter les autorités s'il estime qu'un crime ou un délit est susceptible d'être commis», ajoute le procureur d'Abbeville. Sur Rue89, une porte-parole de l'opérateur concerné, Bouygues Telecom, indique qu'une enquête interne a été ouverte. «Un opérateur n'est pas autorisé à délivrer le contenu d'un SMS aux autorités, sauf s'il y a réquisition judiciaire. Nous n'avons pas le droit de prendre connaissance des contenus échangés par nos clients.» Contacté par Liberation.fr, Bouygues Telecom n'a pas souhaité faire de commentaire.