mardi 21 juin 2011

Cannabis : dépénalisation ou légalisation contrôlée ?

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Cannabis : dépénalisation ou légalisation contrôlée ?


Les députés PS veulent être un exemple en matière de tolérance. Pourtant, ils encadreraient de très près l'industrie de cette drogue, en contrôlant la production, la distribution, et même la consommation. Est-ce le début des coffee shops en France ?
Sélectionné et édité par Amandine Schmitt

Faut-il dépénaliser le cannabis ou non ? C'est typiquement un débat de société puisque, sur l'échiquier politique, il oppose sur des critères peu politiciens, même si à gauche on est divisé. Mais qu'un ancien ministre de l'Intérieur comme Daniel Vaillant ait relancé le débat donne brusquement une nouvelle importance à ce sujet récurrent.

CannabisPhoto Alexodus


Claude Guéant, son plus récent successeur, y est évidemment hostile, incapable de faire le bilan des échecs constants contre le trafic. Car lorsque dans des cités un jeune guetteur, le moins gradé dans la hiérarchie des dealers, peut à lui seul faire vivre toute une famille, comment notre ministre, à moins de régler d'un coup de baguette magique le chômage de masse dans les grands ensembles, ne peut-il pas reconnaître que la lutte contre le trafic est un échec ?

"La loi est inadaptée, et son autorité bafouée"

Comme le note Stéphane Gatignon, le maire de Sevran, ville gangrenée par le trafic de cannabis : "la loi est inadaptée, et son autorité bafouée, elle est inapplicable par ceux qui en ont pourtant la charge". Dans un rapport publié le 2 juin par la Commission mondiale sur la politique des drogues (Global Commission on Drug Policy), une kyrielle de personnalités, dont d'anciens présidents latino-américains, estiment que le combat mondial contre la drogue a échoué et que le seul recours est désormais la dépénalisation du cannabis.

Regardez même où en sont arrivés les trafiquants d'Amérique du sud, utilisant sous-marins et hélicos de combat. Chez nous aussi, toute proportion gardée, plus on augmente les moyens, plus, en réponse, la violence se développe. Partant du constat que la France conserve une des législations les plus répressives d'Europe alors que le niveau de consommation est l'un des plus forts, les députés socialistes font valoir qu'une "légalisation contrôlée" pour les personnes majeures permettrait, "grâce à l'encadrement de la production et de la distribution", d'"instaurer une politique de réduction des risques".

Quatre millions de personnes ont consommé du cannabis en 2005


Les députés PS préconisent la création d'une filière nationale du cannabis qui organiserait et gèrerait la production et la distribution de cette drogue, à l'image de ce qui est fait pour le tabac et l'alcool. "Il convient que l'État soit en mesure de fournir cette substance, sous forme de résine ou d'herbe, à l'ensemble des consommateurs", indique le rapport, en préconisant la mise en culture de 53.000 hectares "selon des règles strictes pour garantir la qualité des produits".

L'État devra aussi contrôler la distribution "tout en interdisant la publicité et la vente aux mineurs". En dépit de la politique de prohibition menée depuis 1970 à l'égard du cannabis, près de 4 millions de personnes avaient, en 2005, consommé de cette drogue au moins une fois dans l'année. 1,2 million de personnes seraient des consommateurs réguliers.


Légaliser de manière contrôlée

Certes Claude Guéant n'a pas tort de souligner que les Pays-Bas, "nation emblématique s'il en est de la politique dite de 'tolérance'", modifient leur approche : restriction drastique de l'accès aux coffee shops désormais interdits aux non-résidents, disparition progressive de la distinction entre drogue dure et drogue douce...

C'est qu'il ne s'agit pas de "dépénaliser" mais de légaliser de manière contrôlée. Deux types d'établissements sont prévus à l'usage des consommateurs majeurs : les premiers uniquement consacrés à la vente, sur le mode des débits de tabac, les seconds, vus comme des "lieux de sociabilité", autorisant vente et consommation. "La vente d'alcool y serait strictement interdite", note le rapport. D'autant qu'avec ces taxes l'État pourrait faire plein de choses. Mais notre gouvernement préfère opérer des coupures de budget.

Les effets négatifs de la prohibition aux USA

Les effets négatifs de la prohibition aux USA des années 20 au début des années 30 sont connus : la demande existant toujours, c'est une offre illégale qui la satisfait. Ainsi se développe la contrebande. Cette dernière met sur le marché des produits de remplacement, souvent frelatés, conséquence logique de l'illégalité de ce commerce.

En effet, refoulée dans la clandestinité, la production se fait dans des conditions déplorables, sans hygiène et à la va-vite. La conséquence en est la très mauvaise qualité des boissons. Mais, ainsi trompés par les vendeurs, les consommateurs n'ont aucun moyen de recours étant donné qu'ils sont eux aussi sous le coup de la loi...

L'autre conséquence, purement économique, du 18e amendement, réside dans l'augmentation très forte des prix. En effet, en raison de l'interdiction du commerce d'alcool, l'offre se réduit. Le nombre de personnes prêtes à se risquer à exercer des actes délictueux n'est pas élevé, en effet. Or, la demande, elle, reste la même. La réaction sur le marché est donc logique : la demande étant supérieure à l'offre, les prix évoluent à la hausse.

C'est exactement ce qui se passe avec le cannabis en France ou les produits présents sur le marché sont de plus en plus de mauvaise qualité et ils ne sont pas moins consommés qu'avant. Daniel Vaillant qui n'a rien à perdre, sa carrière politique étant en bout de course n'a pas tort de demander de "sortir de l'hypocrisie", même plusieurs jeunes loups du PS qui ont devant eux un avenir politique ne veulent pas risquer l'impopularité alors qu'ils ont fait de la sécurité l'un de leurs chevaux de bataille.

Auteur parrainé par Aude Baron



Et comme vous avez tout lu jusqu'au bout, vous avez le droit à une petite vidéo ;o))







Durée : 31:00 | Images : Universcience.tv

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